Avant de rejoindre le Ballet Malandain de Biarritz en 2011, Claire Lonchampt a fait ses classes aux quatre coins de l’Europe. Études, cours de danse, auditions… il est difficile de mener une vie simple lorsqu’on a pour ambition de devenir danseuse étoile. Interview sur le parcours de celle qui a su faire revivre Marie-Antoinette avec tant de grâce.
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Devenir danseuse étoile a toujours été ton rêve?
Pas du tout. Ça s’est vraiment fait petit à petit. Ma mère était professeur(e) de sport, gymnaste en compétition,. Elle a voulu quand j’étais petite, m’inscrire à des cours de gym. Les horaires ne correspondant pas avec l’école, elle m’a inscrit à un cours de danse classique, en se disant que ça pourrait toujours me servir quand je voudrais faire de la gym. Sauf que j’ai pris goût à la danse!

Ma prof de l’époque trouvait que j’avais des aptitudes et elle en a parlé à mes parents. Comme ça me plaisait, elle nous a parlé des écoles en sport étude. Je me suis donc retrouvée à faire l’audition pour l’école de danse de l’Opéra de Paris, en ayant absolument aucune idée de là où je mettais les pieds. Contrairement aux petites filles à côté de moi qui avaient des étoiles plein les yeux et qui semblaient connaître la directrice, une très grande danseuse étoile. C’était le début de l’histoire, je me suis prêtée au jeu et évidemment la passion est venue.
Ça demande tellement de sacrifices et d’efforts, que si on n’a pas la passion, on finit par arrêter. Pour passer d’un niveau à l’autre, il y a des examens chaque année donc c’est déjà compliqué d’arriver à la fin de la scolarité, sans parler de la concurrence qui est très forte. Il faut vraiment avoir les reins solides pour terminer l’école. Et c’est que le début parce qu’ensuite il faut décrocher des contrats à l’étranger ou là, la concurrence est internationale.
Mais je n’ai jamais vraiment eu ce rêve de petite fille, ça s’est construit au fur et à mesure, et une fois que ça a été là, ça ne m’a plus jamais lâché.
As-tu as déjà envisagé de faire un autre métier?
De la façon dont sa se passe, on n’a pas le temps et le loisir de penser à autre chose, parce que ça demande un tel investissement, qu’on ne peut rien faire d’autre à côté. Pour résumer un petit peu ma scolarité, quand j’étais au conservatoire, je commençais à 8h à l’autre bout de Paris. Je devais donc me lever à 5h du matin, faire 1h de métro, avoir cours le matin, puis de midi à 18h j’avais les cours de danse, pour ensuite rentrer le soir et faire mes devoirs. En dernière année de lycée, mes week-end se résumaient à des auditions aux quatre coins de l’Europe. J’avais tout ça en plus de passer mon bac, mon permis et mon diplôme de danse. Au final, on n’a presque pas letemps d’avoir une adolescence.

Tu estimes être passé à côté de ton adolescence?
Passer à côté je ne sais pas, c’est l’avenir qui nous le dira. Mais je ne pense pas, parce que j’ai quand même vécu d’autres expériences enrichissantes, et ça nous apprend à grandir plus vite. Mais il est évident que je n’ai pas eu une adolescence comme tout lemonde. Mais chacun à des parcours différents, mais oui, ça enlève quelque chose. Il y a quelque chose d’un peu extraordinaire dans l’adolescence que j’ai vécue, ce qui enlève une part de naïveté.
Peux-tu nous raconter ton parcours artistique après les études?
Quand on sort de l’école, on doit passer des auditions pour pouvoir dénicher des contrats et pour travailler. Dans ces cas-là, la concurrence est tellement importante, qu’on va là où on a décroché un contrat. En sortant du conservatoire, j’ai passé une trentaine d’auditions, ce qui est extrêmement dur psychologiquement. Parce qu’à chaque audition, il y a 400 filles, on a des numéros, on a des brassards… On peut ne pas faire la classe entière et parfois on se fait virer au bout du premier exercice. Donc quand on obtient un contrat, c’est quelque chose d’exceptionnel, parce qu’on arrive à être celle qui est élue parmi je ne sais pas combien de filles.

J’ai réussi à décrocher un contrat à Zurich. Ce sont généralement des contrats de 1 an, qui sont plus ou moins renouvelés. En ce qui me concerne, ça n’a pas été le cas donc il a fallu reprendre le chemin des auditions. J’ai par la suite, décroché un contrat à Helsinki. J’y suis restée pendant 3 ans. Après ces quelques années, le pays et le climat commençaient à être très pesants. C’était compliqué à vivre pour moi, donc j’ai décidé de partir. Et j’ai réussi à décrocher un contrat à Amsterdam au Het, qui est l’équivalent de l’Opéra de Paris. C’est l’une des plus grandes compagnies en Europe, de renommée internationale. À cette époque-là, j’avais déjà pas mal d’expérience, un peu de maturité, et j’avais l’impression d’avoir fait le tour de ces grandes compagnies, qui sont vraiment de très grandes maisons, avec en 80 et 90 danseurs, et avec un mode de fonctionnement très particulier. Je suis donc partie d’Amsterdam, car à cette époque-là, j’avais simplement envie d’autre chose, comme une compagnie avec un format d’avantage familial, et être un peu moins un numéro parmi tant d’autres.
Je connaissais déjà Thierry Malandain, parce qu’au conservatoire, j’avais déjà pu travailler avec lui. Je suis venue à Biarritz, j’ai passé l’audition et j’ai eu la chance d’avoir eu un contrat au Pays Basque.
Vous êtes combien de danseurs au ballet Malandain?
On est 22 actuellement: 11 filles et 11 garçons. Ce qui est déjà pas mal pour une compagnie avec ce format-là de tournée, surtout qu’on est permanent, ce qui est assez rare et qui représente une charge assez importante pour la compagnie. C’est une belle victoire pour la compagnie d’avoir autant de danseurs.
Que représente le ballet Malandain dans le monde de la danse?
Paradoxalement, on est plus connu à l’étranger qu’en France. À mes yeux, la renommée de Thierry n’est pas assez reconnue en France. Il a été nommé académicien il y a très peu de temps, c’est un chorégraphe qui est là depuis un certain nombre d’années. Pour moi il est hyper productif, avec un talent incroyable, et on le mesure chaque jour en tant que danseur parce que c’est assez rare d’avoir un chorégraphe aussi créatif. L’un des risques quand on est danseur, c’est qu’on peut être amené à s’ennuyer au bout d’un moment parce que le chorégraphe n’arrive pas à se renouveler, ce qui n’est pas le cas de Thierry. D’une création à l’autre, il arrive à nous plonger dans atmosphères et des univers qui sont totalement différents.

Ils ont construit, la renommée de la compagnie à force des bras, et on commence à avoir une belle reconnaissance en France. On est programmés à l’Opéra Royal de Versailles, mais aussi régulièrement au Théâtre National de Chaillot, ou encore à la Maison de la Danse de Lyon. On commence donc à avoir une renommée en France, mais ça arrive plus tard que celle que l’on a à l’internationale, et c’est le paradoxe de la compagnie. On va être amené à travailler aux États-Unis, en Amérique du Sud, en Asie. On est très connus en Allemagne, en Italie, en Espagne. Mais la tendance commence un peu à s’inverser donc c’est une belle reconnaissance pour nous en tant qu’artistes, mais aussi pour Thierry. On lui souhaite juste que sa reconnaissance soit àla hauteur de son talent.
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